"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

jeudi 24 décembre 2009

Fols-en-Christ: sainte Isidora




Sainte Isidora, nommée Varankis en copte, était une grande ascète qui, à cause de sa rare humilité et de son insigne abaissement volontaire, avait choisi pour elle-même le combat spirituel singulier de la folie en Christ.

A cause de son étrange comportement, les autres moniales du couvent de Tavena-Min la dédaignaient au point de ne pas vouloir même s’asseoir en sa compagnie et elles la traitaient comme quelqu'un de complètement insensé. Cependant, Isidora accomplissait ses obédiences monastiques comme si elle était l’esclave personnelle de chaque sœur. Elle était prête à accomplir n’importe quelle tâche. Cette vierge bénie devint comme l’ordure du monastère et, par là, elle accomplit la parole de l’Ecriture : «Que nul ne s’abuse. Si quelqu'un parmi vous pense être sage dans ce siècle, qu’il devienne fou afin de devenir sage» (1 Co 3. 18). Au lieu de porter une coiffe et des souliers ou des sandales, sainte Isidora couvrait sa tête de haillons et marchait pieds nus. Des quatre cents moniales du monastère, pas une seule ne se souvenait l’avoir vue manger un repas véritable. Elle se nourrissait des miettes de la table et des restes dans les assiettes qu’elle lavait.

De nombreuses moniales se mettaient en colère contre la bienheureuse moniale et elle supportait leur mépris avec patience et en silence. Personne ne l’entendit jamais faire une réplique grossière ou grommeler : plus elle était traitée cruellement, rabaissée et vilipendée et plus elle se réjouissait en esprit, s’exerçant dans cette «sage folie de la Croix du Seigneur». Sa vertu cachée n’était connue que de Dieu seul et Il choisit de la glorifier dès cette vie. La sainteté de cette ascète fut révélée à l’ermite Pitirim, célèbre athlète qui était lui-même disciple de saint Pacôme le Grand.

Un jour, alors que saint Pitirim était dans la solitude du désert de Porphyre, le Seigneur permit qu’il fût saisi par des pensées de vaine gloire.
"Qu’est-ce qui te fait penser que tes combats soient si excellents ? demanda un ange qui lui apparut. Aimerais-tu voir une femme plus pieuse que toi ? Va au monastère de Tavena et tu trouveras une moniale qui porte un haillon sur la tête. Elle est supérieure à toi parce qu’elle s’adonne à son combat spirituel au milieu des gens ; elle sert tout le monde et bien que tout le monde se moque d’elle et la vilipende, elle n’a jamais détourné son regard de Dieu en son cœur. Mais toi, assis ici-même dans le désert, tu pèches par tes pensées dans la ville où elles te portent".

Saint Pitirim se hâta d’aller au monastère de Tavena et demanda à voir les moniales. Toutes s’assemblèrent, sauf Isidora. «Nous sommes toutes là, sauf la folle qui est dans la cuisine».
Le staretz demanda qu’elle lui soit amenée. Isidora fut amenée de force, résistant à chaque pas. En la voyant, saint Pitirim tomba à ses pieds et dit «Bénis-moi Amma [Mère]» ! La bienheureuse vierge tomba à ses pieds et demanda en suppliant sa bénédiction à lui. Tout le monde fut étonné et quelqu'un dit : «Abba, ne te couvre pas de honte, c’est une folle» !
«C’est vous qui êtes folles, répliqua le staretz. Elle est spirituellement plus élevée que vous et moi ; elle est notre mère et je prie d’être trouvé égal à elle au Jour du Jugement» !
Quand les moniales entendirent ceci, elles tombèrent en larmes aux pieds d’Isidora, confessant leurs offenses contre elle et se repentant sincèrement. Saint Pitirim pria pour elles et quitta le couvent. Plusieurs jours plus tard, Isidora quitta le monastère, fuyant la gloire et l’honneur qui lui avaient été accordés.

Nul ne sait où elle alla, où et quand elle mourut.

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Saint Ephrem le Syrien († 373) recueillit la vie de sainte Isidora après avoir visité les déserts d’Egypte en 371. Le monastère de Tavena-Min fut fondé par la sœur de saint Pacôme le Grand.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Lev Puhalo & Vasili Novakshonoff
God's Holy Fools
Synaxis Press,
Montreal, CANADA
1976

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